Pistes à explorer

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Pour entrer directement dans le vif du sujet, voir l'article: L'ouverture féconde ou l'errance du chercheur, du 24 janvier 2017, référencé par le libellé "feuille de route".

05/10/2017

Notre Table Ronde appelée à devenir Table d'Hôtes

Certains auraient pu penser que la Table Ronde du 28 septembre à Houffalize se limiterait à des propos de courtoisie en présence d'un public bienveillant. La bienveillance ne faisait aucun doute, mais le niveau d'intelligence sur lequel se sont immédiatement placés les échanges a certainement provoqué des remous qui commencent à creuser dans l'intimité des consciences.

Arnaud nous a secoués d'une manière à la fois humoristique et salutaire. " Et si vous, les anciens, preniez la peine de monter sur ce podium à la place des jeunes, seriez-vous prêts à entendre les questions qu'ils brûlent eux aussi de pouvoir vous poser?" nous asséna-t-il, provoquant un silence riche de sens.

Mais Arnaud nous invite à y réfléchir d'une manière qui demande un peu plus de subtilité. Et voici donc ce qu'il ajoute à cette interpellation.

- Comment le mouvement "Poursuivre" peut-il créer des espaces de rencontre entre jeunes et anciens qui viseraient à questionner et échanger sur des sujets qui leur tiennent à coeur conjointement, sur des enjeux qu'ils ont identifiés ensemble et qu'ils estiment importants (jeunes et anciens). Du coup, l'interpellation du public est davantage liée à un processus qui serait à mettre en place, plutôt qu'à des questions précises qu'il faudrait formuler. La jeune génération croit très fort à la confrontation des points de vue et à la richesse d'un débat où les idées ont l'occasion de s'enrichir. 
Pour un mouvement qui se veut un espace de réflexion et d'idée, il est absolument indispensable de permettre cette confrontation avec d'autres (jeunes, anciens, venus d'ailleurs...) dans une perspective de transformation sociale. Car, les idées seules ne peuvent vivre qu'à travers les actions et inversement.

S'il faut en venir aux questions, celles-ci semblent s'imposer de prime abord.

- Comment les moins jeunes envisagent-ils leur place/rôle dans la société actuelle (à coté des jeunes, en soutien, avec...)? L'ancienneté sublimée consisterait-elle à quitter l'avoir pour l'être, ou à étendre l'être jusqu'à l'être avec (NDLR)?
- Que peuvent apporter les moins jeunes, selon eux, aux plus jeunes qui se mobilisent tant bien que mal? 
- Comment faire mouvement ensemble et quelles sont, selon nos anciens, les actions à mener pour rendre celles-ci plus égalitaires? 
- Et cette question plus intime, capable de réunir des fragilités mieux assumées: "De quoi doutez-vous et qu'est-ce qui vous anime, aujourd'hui, pour aller de l'avant?"

Et Arnaud a la modestie d'ajouter: "C'est à chaud, ce soir, et peut-être que mes questions auraient été différentes il y a une semaine. Ce ne sont pas des certitudes et pour moi, ce qui compte, c'est de voir la façon dont on peut avancer à partir des préoccupations de chacun". 

Merci, Arnaud. Tu nous montres le chemin pour faire en sorte que notre Table Ronde expérimentale devienne, à terme, une Table d'Hôtes capables d'inviter le monde extérieur, et d'abord beaucoup de jeunesse pour que se disent et se vivent les attentes respectives, dans le sens d'une plus vibrante humanité.

01/10/2017

Table ronde en direct: " Jeunes en mode créatif " à Houffalize le 28/09/17

Rapport oral rendu le 29 septembre en session finale.
Transcription incomplète et approximative de la prise de parole des rapporteurs de la journée 04 des Journées d'étude de "Poursuivre", celle dédiée aux Tables Rondes de la jeunesse. Voir dans l'article du 8/09/2017 les profils de nos 5 jeunes panélistes, ainsi que dans tous les articles libellés "panel".

C’était un vrai plaisir de participer à cette table ronde! Les jeunes (depuis moins longtemps que nous ...) s'expriment librement, avec un naturel déconcertant que les anciens ne se souviennent pas avoir exercé au même âge avant mai 68 (voire même encore au-delà). Leur amour de la vie est ressenti intensément, et je ne crois pas me tromper en disant que tout l'auditoire a savouré ces instants magiques.



Et en même temps, il y a beaucoup d’humilité dans leurs propos car, heureusement, un sentiment du droit absolu à l’erreur est bien partagé par tous. Ils nous démontrent que leur droit à l'erreur les a ouverts davantage, et leur a procuré une aisance à pouvoir rebondir. L'un d'entre eux, face à l'inconnu et à l'étrange, parlait de « fragmentation de la personne » et de la peur qui se niche dans les interstices. Le reconnaître, c'est déjà s'armer pour affronter l'inattendu. En fin de compte, le désir d’être acteur et pionnier du changement demeure plus fort que tout.



Ils évoquent en pleine conscience les « déclencheurs » de leurs engagements, qui peuvent être très variés : études, voyages, opportunités, erreurs, rencontres, ruptures, imprévus, l'attention aux signes des temps en accord avec un désir profond. C'est donc quoi: ce désir irrépressible de dépassement, de renouveau? Où aller le chercher? Une propriété évolutive de la nature humaine que la culture peut selon le cas étouffer ou libérer?



Nous sommes touchés par leur recherche de sens, partant bien plus du réel que d'un vague idéal qui, en d'autres temps, faisait le lit de bien des engagements de leurs anciens. Leur sentiment de responsabilité semble alimenté aujourd'hui par l’envie d’apporter leur petite pierre et de passer au concret. En poursuivant leurs engagements, ils constatent tous que des liens interpersonnels profonds et vivants se créent et s'entrecroisent qui, en retour, les transforment et les rendent plus vivants, ouverts et contagieux dans les milieux où ils évoluent.

Nous avons assisté en direct à certains tournants de leurs existences. Comment ne pas être frappés par leur audace, leur intensité de vie, leur fécondité et, surtout, par leur profonde quête intérieure. Pour eux, la créativité n'est pas autre chose que la manifestation de la vie. En d'autres termes, cesser de questionner l'acquis, c'est se préparer à mourir.




L’Europe fait partie de leur cadre de vie: ils y ont grandi, ils y ont fait leurs relations, ils puisent à ses sources multiples, ils pratiquent d'autres langues, ils travaillent en réseaux, c’est acquis. C'est complètement intégré à leurs moeurs. Quel décalage avec les générations précédentes, encore en proie à des états d'âme sur l'exclusivité, les préférences linguistiques, la bien-pensance, ou l'académisme ! Cela dit, l’Europe reste une création humaine, et tous déplorent que sa démocratisation ne soit pas terminée. Comme pour toute construction, la résistance à l'entropie naturelle est une tâche sans fin, et le développement de ses fonctionnalités un processus de maturation, comme c’est le cas pour tout organisme vivant. L'Europe traverse des turbulences et grandit à travers les crises, elle doit sans cesse se renouveler : "ce qui ne se renouvelle pas meurt" est la quintessence de l’expression de nos jeunes.

Tous, ils sont habités par le désir de faire advenir le monde qui est en train d’émerger. Rappelez-vous : la créativité est la vie, la vie est évolutive – ne subsiste que ce qui évolue.

Mais pour évoluer en communauté, il faut créer un espace public du débat, car les choses importantes se passent toujours à la périphérie, qui n'est pas notre lieu d'observation le plus naturel. C'est une tâche à tous les niveaux que d'aller aux périphéries, non pas avec condescendance, mais avec l'appétit de la jeunesse et la certitude de pouvoir s'y renouveler. L'interface, l'entre-deux, la frontière: autant de lieux où se produisent les événements qui comptent pour un destin collectif, et qui deviennent aujourd'hui les objets de recherches intelligentes et d'expérimentations, avec le changement d'échelle des lieux de vie ou de migration (mondialisation). Toute avancée devra être de plus en plus mûrie par une intelligence collective, avant de pouvoir prendre corps. Nous voyons bien l'aisance de nos jeunes à épouser les mécanismes de mise en commun, de partage, de délibération collective, de veille critique, tous plus élaborés qu'en d'autres temps.


Nous sommes impressionnés par leur pragmatisme, leur curiosité féconde, leur audace et leur altruisme. Cela se traduit par une capacité à offrir de leur temps à l’autre qui vient les traverser. Pareille capacité se nourrit de leur conviction d'avoir à attendre quelque chose de chaque interlocuteur. Moins d'ego, plus d'écho dans la rencontre. Cela se traduit aussi par une facilité à arrêter une trajectoire, pour en emprunter une autre insoupçonnée. Leur disponibilité à l'interactivité, plus grande que celle des anciennes générations, les prépare mieux que nous l'avons été à vivre un monde mélangé, systémique et évolutif.

Regarder là où les autres ne regardent pas, veiller au mélange des genres, être conscient de l’importance de l’inattendu. Cela ne devrait dépendre ni des origines, ni des générations. A chacun la possibilité de se comporter en "chercheur". La performance n'est pas l'apanage du sportif, l'éveil n'est pas l'apanage de l'éducateur, le soin d'autrui n'est pas l'apanage du médecin, le soin de la planète n'est pas l'apanage des écolos, la beauté du regard n'est pas l'apanage de l'artiste.  Nous voyons bien que la pulsion de recherche et de dépassement, le goût de faire advenir du neuf, tellement apparents chez ces jeunes magnifiques, cela nous étreint tous dans nos petitesses comme dans nos rêves.


Parmi l'audience, une professeure de sciences a manifesté sont intérêt et son encouragement pour leurs travaux. Et avec une simplicité émouvante, la réponse fut : « les petits encouragements sont plus importants pour nous que les grands prix ». Serait-ce un rôle sous-évalué qu'il incomberait aux anciens d'assumer? Avec le développement des sciences cognitives, la mobilité, la connectivité, la mondialisation, la numérisation, etc, les anciens ne peuvent plus se complaire dans le rôle de dépositaires du savoir. La transmission, qui est au coeur des relations intergénérationnelles, ne peut plus se réduire à une quelconque forme de transmission d'un savoir. D'un autre côté, nous avons à prendre plaisir et force dans cette attente manifestée par 5 jeunes exceptionnels: leur rendre la confiance, les sécuriser là où ils prennent des risques que nous n'aurions peut être pas pris avant, leur faire la fête à chaque occasion de se réjouir, et alimenter leur flamme par l'exemple que nous devrions toujours donner d'un immense respect pour la vie.

A partir du rapport de Brigitte Gillerot et Monika Sander, et de la modération apportée par Etienne Magnien.