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27/04/2017

Shootés à l'auditoire ou ... shootés à l'auto-stop ?

Tenons pour admis que toute personne en bonne santé, portée par une éducation et une culture décentes, connaît immanquablement les affres de la soif. Au sens existentiel, il s'entend. Soif d'être, d'expérimenter, d'élargir son imaginaire.

Or, certaines éminentes figures de nos univers culturels n'ont de cesse de nous montrer par quels chemins elles ont cherché à étancher cette soif, que tous nous éprouvons. Le prochain article, que vous découvrirez dans quelques jours, cherchera à caractériser certains aspects de la soif existentielle, dont l'importance est cruciale pour faire société avec nos semblables. Le fait est, cependant, qu'elle ne se manifeste pas chez tout le monde de la même façon, en intensité et en qualité. Elle est même variable dans différentes phases de notre propre vie. D'où vient-elle? C'est une question pour les anthropologues, les psychologues ou les penseurs de l'éducation. Comment peut-elle être ressentie et utilisée? Voilà bien une question pour nous, en revanche. Tenez, avant d'ouvrir momentanément cette discussion, laissons-nous questionner: quelle espèce de soif intellectuelle m'a traversé pendant mes apprentissages de la vie? Pour faire simple: me suis-je davantage "shooté" à l'auditoire, ou plutôt à l'auto-stop (sic)? Même question pour nos jeunes autour de la Table-Ronde.

Shooté à l'auditoire, c'est quelqu'un qui aurait couru après des maîtres, des modèles, des mentors. C'est un collectionneur de sources d'inspiration répertoriées. C'est un héritier de ses pères. Sans doute est-il aussi un lecteur invétéré. Il fait crédit aux meilleurs d'entre nous et grandit avec eux. Ses pantalons sont usés à force trainer dans les auditoires de la science et de la culture.


Shooté à l'auto-stop, c'est tel autre qui aurait préféré l'école buissonnière, pour qui l'expérience vécue passe avant la science codifiée, qui se sent mal dans les catégories académiques mais développe un talent d'observateur de l'étrange. Quand il consulte un dictionnaire, il s'arrête sur n'importe quoi et oublie entre temps pourquoi il avait commencé sa recherche.


Bien sûr, vous vous êtes reconnu dans les deux archétypes, peut être à des dosages différents. On en reparle la prochaine fois, si vous le voulez bien.

02/04/2017

Peut-on dés-institutionnaliser la veine créatrice ?

C’est l’hypothèse d’un glissement de l’attention de nos esprits créatifs, de l’exploration du monde vers l’exploration de l’humain.
Pour en prendre conscience, il ne convient sans doute pas de se placer sur un plan trop rationnel ou trop structuré. Car la plupart des cercles académiques s’accrocheront à l’idée, avec bien des évidences incontestables, que les grandes conquêtes de l’espace, de la matière, de l’intelligence, de la santé, etc, continuent à occuper des générations de chercheurs passionnés. Et c’est vrai. Mais on ressent néanmoins quelque chose comme … un glissement.

Il y a des signes avant-coureurs. Par exemple, le déclin régulier depuis environ 2 décennies, au moins pour les régions les plus développées, de la proportion des nouveaux inscrits dans les facultés scientifiques et technologiques, par opposition à la popularité renforcée des sections langues-commerce-droit-arts du spectacle (ou apparentées), signalant l’intérêt grandissant pour tout ce qui est de l’ordre du relationnel.

Même notre modeste petit exercice de Table Ronde sans prétention commence à suggérer une tension entre ces aventures parallèles, qui vont se situer dans les sciences dures, les sciences molles ou, de manière confuse, au coeur des apprentissages qui relèvent directement de la connaissance de l’autre. N’en faisons pas des généralités, mais reconnaissons néanmoins que, balayant autour de nous le vaste champ de la créativité, ce sont nos interlocuteurs des sciences dures qui se montrent aujourd’hui les plus réticents à se considérer encore des aventuriers de la connaissance; même s’ils avouent connaître indubitablement les mêmes passions, et des émerveillements de même nature que tous les autres passeurs d’horizons. Ils ont plus de mal que leurs anciens à se mettre en scène dans leurs habits de pionniers, et ne sont pas spontanément demandeurs de communication avec leurs semblables. Ils sont plus couramment pris de doutes sur leur rôle social, quand bien même leurs conquêtes continueraient à inspirer le respect.

Au contraire, notre exercice à l’écoute des jeunes en mode créatif nous a révélé de bien belles surprises, sous la forme d’adhésions inattendues. Tout se passe comme si l’esprit créatif devenait apparemment plus porteur d’espoir dans la conscience d’un anthropologue, d’un animateur culturel ou social, d’un historien, d’un romancier, en écho à ces lieux d’apprentissage s’adressant directement à l’humain. Pour eux, le laboratoire, c’est la ressource humaine et ses constructions sociales et culturelles (entendant la science elle-même comme une manifestation culturelle, au même titre que les arts et les lettres). Ces témoins-là, aux frontières de l’humain, nous montrent par leur soif d’expériences et de confrontations intellectuelles être plus prompts à se porter aux premières lignes d’une autre vision du progrès.


Il nous tarde d’entendre les réactions de nos protagonistes dévoués aux sciences dures, parce qu’ils détiennent pour longtemps encore la clé d’une meilleure gestion de notre milieu, mais souffrent apparemment d’une timidité à croiser leurs connaissances spécialisées avec les autres composantes civilisationnelles, où fermente l’imagination collective par laquelle nous faisons société.

03/03/2017

Il y a quelque chose en nous de Tennessee

Qui sont ces "jeunes en mode créatif" ? Cette Table Ronde ne projette-t-elle pas des figures parfois caricaturales? Qui peut se reconnaître dans tel ou tel chercheur aventureux, happé par la jet-société des milieux savants?

Nous sommes d'accord, certains de nos témoins choisis sont des chercheurs de première classe, et il y a de bonnes raisons à cela. Vous les trouverez à la lecture de notre chapelet d'articles ci-dessous. Leur niveau élevé n'est cependant pas hors sujet. S'ils en sont arrivés là, ce n'est pas complètement un hasard, ni le coup de baguette magique qu'une bonne fée aurait porté sur leur front innocent dès l'âge du berceau. Ils ont en effet mis en oeuvre un arsenal de dispositions personnelles, précisément celles sur lesquelles notre Table Ronde voudrait porter l'accent. Et puis, ces dispositions d'esprit ne sont pas l'apanage exclusif des hautes sphères de la recherche scientifique, elles y sont simplement plus faciles à illustrer. En revanche, les créateurs petits ou grands, connus ou inconnus, sont bien plus répandus, et vous les rencontrez sûrement.

Essayons ce petit jeu: êtes-vous aussi un chercheur, par certains côtés? Le plus simple pour tenter de répondre honnêtement à cette question, serait d'atteindre notre vérité par approches successives.

Les scientifiques sont essentiellement des chercheurs de savoir. C'est pour nous démonstratif. Mais que dire des chercheurs de savoir faire? Pensons au savoir faire technique, au savoir faire artisanal, au savoir faire associatif ou psycho-social, et ainsi de suite. C'est, par exemple, depuis la nuit des temps que les apprentis artisans privilégient le voyage, la recherche des maîtres de leur époque, la multiplicité des expériences in situ pour parvenir à ce qu'il est convenu d'appeler avec respect : la maîtrise. Les artisans savent que leur domaine ne connaît aucune frontière. Leur vérité à eux, c'est d'essayer, de pratiquer, de rencontrer, de se mesurer à d'autres, de perfectionner sans cesse. Ne sont-ils pas de merveilleux chercheurs?

Et puis, tous les domaines d'expertise jusqu'à la musique ou le sport (quoi de plus populaire aujourd'hui?), vivent et se renouvellent d'émulation, de concurrence et de confrontation. Les musiciens ou les sportifs professionnels ont bien des qualités des chercheurs scientifiques: la patience d'un travail acharné, l'entrainement et le recyclage permanent, les rencontres internationales, la mobilité personnelle, l'écolage auprès de maîtres incontestés, le besoin de prouver leur excellence, le dépassement de l'échec, la sensibilité personnelle à la reconnaissance des pairs, etc. Il y a chez eux une gourmandise du défi qui n'est pas étrangère à l'appétit de tous les chercheurs de bonne volonté.

N'écartons pas la possibilité qu'un chercheur veille en chacun de nous. Nous entrons dans la version plus intime de la recherche. Pour se faire comprendre, rien de tel que les exemples caricaturaux, ne les dénigrons pas. Prenons le cas particulier de ceux ou celles qui sont en recherche de leurs origines, parfois une vie durant, soit qu'ils soient issus d'immigrés dont les familles souches se perdent dans tel ou tel naufrage, soit qu'ils soient nés sous X et demandeurs d'une parenté biologique, ou bien d'autres situations encore. Ce sont des recherches tenaces, volontaires, passionnées, ouvertes à tous les possibles, de nature à remettre en cause la personne et toutes ses certitudes. Les recherches personnelles revêtent tant d'autres formes suivant le vécu de chacun, avec ce point commun qu'elles sont souvent déclenchées ou alimentées par un échec, un événement dramatique, un vide intérieur, un obstacle ou un changement de cap. A l'évidence, l'intranquillité a quelque chose à voir avec la recherche.

Dans la sphère de la spiritualité et du mysticisme, il est d'usage d'évoquer aussi quelques grands chercheurs, mais point n'est besoin de monter si haut. Vous conviendrez avec moi qu'un même fil rouge réunit les chercheurs de tous poils, et particulièrement ceux qui viennent d'être mis en scène brièvement pour les besoins de la démonstration. Ce fil rouge doit être la recherche de sens. Chacun dans sa quête construit ses propres itinéraires pour donner du sens à sa manière d'être au monde. Le sens d'un artiste, d'un musicien, d'un sportif, d'un artisan, d'un cuisinier, d'un ingénieur ou d'un scientifique. Le sens par la capacité à être créatif dans sa sphère d'existence.

Les itinéraires sont donc à trouver et à pratiquer. Mais ne jamais poser son sac et s'assoir bêtement sur le talus. Chercher et trouver les chemins. Là-bas, au-delà des horizons que nous n'avons pas choisis. De là l'exercice que nous nous proposons en Table Ronde. Parfois, en effet, une carte ou un bon GPS rendent la recherche d'itinéraires plus accessible. C'est tout l'intérêt de pouvoir partager l'expérience d'un modèle, d'un prédécesseur, ou d'un pionnier. Entendre un scientifique ou un artiste témoigner de sa recherche, et nous révéler quelques uns des atouts qui peuvent lui ouvrir la voie, ce n'est pas ériger le statut du chercheur au-dessus du commun des mortels. C'est mettre l'eau à la bouche, donner à chacun d'y croire, donner envie. Il n'en va pas autrement de nos modèles littéraires. Vous souvenez-vous de ceux de votre adolescence?

Avec cette formidable envie de vie
Ce rêve en nous c'était son cri à lui 
Oh, oui! Tennessee,
Y a quelque chose en nous de Tennessee.